Cannes 2010, Day 2 : 15/05/10
14/07/2010PROJECTION => 11:00 /// Un certain regard
PROJECTION => 14:00 /// Compétition
PROJECTION => 19:30 /// Hors compétition
PROJECTION => 00:45 /// Séance de minuit
WALL STREET : MONEY NEVER SLEEPS
PROJECTION => 19:00
Cinéaste reconnu et auteur engagé, Oliver Stone présentait hors compétition son dernier film lors du dernier festival de Cannes 2010. C’est donc plus de vingt après le premier Wall Street que l’on retrouve Michael Douglas tout juste sorti de prison au moment du krach boursier de 2008. Il fait la rencontre de son futur gendre, une caricature de yuppie prêt à tout pour venger le limogeage aux relents dramatiques de son mentor.
Même en cherchant bien, Oliver Stone n’a pas fait de bon film depuis plus de dix ans, et malheureusement la tendance se confirme avec cette suite. Si les manipulations sont atroces, si ce que le metteur en scène dénonce est véritablement immonde, on reste complètement hermétique à la surenchère de termes techniques et aux dialogues interminables.
Si les acteurs font ce qu’ils peuvent au milieu de ce marasme politico-financier, Oliver Stone nous gratifie d’une mise en scène dont il a l’habitude, avec steady-cam à outrance et sa sempiternelle association entre la force des mots et des images. Pire, il nous inflige une intrigue amoureuse insipide qui vient alourdir un scénario déjà peu maîtrisé.
Un film bavard donc, et sans grand relief, qui perd malheureusement de vue son sujet initial alors qu’il mériterait un traitement ô combien plus corrosif.
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THE HOUSEMAID
PROJECTION = > 22:30
Cinéaste sud-coréen de haut vol révélé par le formidable President’s last bang, IM Sang-Soo était sélectionnée à Cannes 2010 avec The Housemaid, une remarquable variation sur les abus de pouvoir de la bourgeoisie.
L’histoire raconte comment la jeune et naïve Lee Euny, en devenant gouvernante pour une riche et influente famille, finira par obséder le maître de maison, Hoon, au point de faire basculer la vie de tout ce microcosme autrefois si bien réglé.
BRIGHT STAR - COMPETITION
Une histoire d’amour impossible dans une Angleterre du XVIIIe siècle entre un poète romantique incompris et une jeune aristocrate qui passe son temps à broder… ça sent le mélo non ?
Le dernier film de Jane Campion, déjà récompensée par une Palme d’or pour « la leçon de piano », livre une œuvre classique et bavarde. Cette histoire d’amour platonique entrecoupée de récitations de poésie est lourde et prévisible. Basculant dans le drame absolu avec une tendance à la surenchère ridicule, ce long-métrage qui parle d’amour de manière surannée est trop indigeste par son ambiance guindée et sa mise en scène classique.
Reste une belle distribution – Ben Whishaw (vu dans « le parfum ») et Abbie Cornish en tête – et une reconstitution simple mais toute en finesse de l’époque.
TAKING WOODSTOCK - COMPETITION
Le cinéaste taïwanais multi récompensé Ang Lee revient avec une comédie sur l’envers du décor de Woodstock, où comment un décorateur d’intérieur revenu vivre chez ses parents récupère l’organisation d’un concert refusé par une bourgade voisine de son bled et où afflueront un demi million de personnes.
Drôle, subtil, bien interprété, le film a surtout l’intelligence de ne montrer aucune archives ou moments musicaux de l’événement. Ce sont plus les conséquences sur les gens, l’économie locale et les mentalités qui prédominent ici. Malgré certaines répétitions et des longueurs sur la fin, ce long-métrage à la bande-son enchanteresse vous fera passer un très bon moment. Ajoutez à cela une distribution inspirée (Liev Schreiber est légendaire) et une reconstitution soignée font de ce long-métrage une vraie réussite. L’enthousiasme communicatif de ce film donne vraiment envie d’avoir connu Woodstock, le centre de l’univers pendant 3 jours.
NE TE RETOURNE PAS - HORS COMPETITION
Suite à l’écriture d’un roman en partie autobiographique, un auteur remarque des changements autour d’elle. D’abord des objets, puis des gens. Sa quête pour retrouver sa mémoire avant ses huit ans va l’emmener en Italie sur les traces d’un étrange secret.
Si le suspense tient bien la route pendant une heure, que le film offre de vrais moments d’angoisse et suscite l’intérêt de son audience, cette quête perd son fil dans des répétitions un peu lourdes.
Marina de Van offre tout de même une œuvre décalée avec une impressionnante mise en scène et des effets spéciaux réussis. La musique impeccable contribue à l’ambiance insaisissable du film. L’originalité et la créativité de ce long-métrage est malheureusement ternie par une narration bancale qui s’étire trop en longueur.
Outre une réalisation soignée, l’autre tour de force du film est de nous gratifier des interprétations de Sophie Marceau et Monica Belluci. Si malheureusement tout le reste du casting est inégal, la performance des deux comédiennes principales mérite le détour.
AGORA - HORS COMPETITION
Péplum grandiose de près de 75 millions d’euros, le dernier film d’Alejandro Amenabar (réalisateur espagnol de « Tesis », « Ouvre les yeux », « Les autres » et « Mar adentro ») nous plonge à Alexandrie dans une période sombre de son histoire.
Au plus près de la réalité archéologique, ce long-métrage met en scène à travers la sublime Rachel Weisz le personnage d’Hypatia, astronome et philosophe antique, opposée à la montée en puissance d’un intégrisme chrétien à Alexandrie.
Les décors exubérants, les figurants par centaines, la musique orchestrale, le drame épique… tous les ingrédients sont réunis pour faire de « Agora » un grand film. Sur 2h20, le long-métrage s’étire entre recherches astrales et théologiques. S’il donne l’impression d’hésiter entre les deux sujets, Amenabar grâce à son sens de la narration et du rythme nous passionne et nous émeut.
Si par moments les décors font malheureusement trop carton, les couleurs et les angles choisis par le cinéaste font vite oublier ce léger défaut. Au-delà de la mise en scène remarquable, saluons également les interprètes formidables de cette fresque. Rachel Weisz est juste exceptionnelle, toute de grâce, d’intelligence et de justesse. Pour lui donner la réplique, le trop rare Michael Lonsdale et les très bonnes surprises Oscar Isaac et Max Minghella.
Entre rires, réflexions, larmes, haines, le film nous transporte dans un faisceau d’émotions extraordinaires, preuve que l’on est en présence d’un grand film. Malgré sa réussite évidente, le seul frein au succès du film pourrait être son sujet peut-être trop confidentiel.
KINATAY - COMPETITION
Dérangeant, malsain, et partiellement hué à Cannes, ce long-métrage philippin de Brillante Mendoza fera très certainement parler de lui.
Il met en scène l’histoire d’un jeune policier invité bien malgré lui à la descente sanglante et morbide de ses collègues. Avec une unité de temps (une soirée) et de lieu (en voiture) quasi unique, le film ne permet pas au réalisateur de s’épancher au niveau de la mise en scène mais ce qu’il entreprend est totalement réussi. Tout est sombre, indistinct, et accompagné d’une musique très oppressante. Le malaise provoqué est immédiat et ne lâche le spectateur qu’à la toute fin.
S’il est long à se dessiner, le film bascule néanmoins petit à petit dans l’horreur. Pas au point de sursauter mais juste par sa situation glauque et malsaine à souhait. Son interprète principal est impeccable, totalement paralysé par les événements qu’il subit. Son grand tort est de ne pas savoir y mettre un terme ou de partir alors qu’il en a plusieurs fois l’occasion.
Terriblement remuant par rapport à la nature humaine, ce film montre avant tout qu’une fois que l’on perd son intégrité, on la perd à jamais. Est-ce que notre éthique, notre morale, sont ce que l’on a de plus précieux ?
VENGEANCE - COMPETITION
Initialement prévu pour Alain Delon, ce film – qui fait la part belle aux références au cinéma de Jean-Pierre Melville – offre à Johnny Halliday l’occasion de revenir au cinéma. Dirigé par le génie hongkongais Johnnie To, le chanteur français croise du fer avec les triades locales responsables de la mort de sa famille.
Si le scénario est très limité, il constitue surtout un prétexte pour réaliser un polar sombre et stylé comme seul Johnnie To sait le faire. Les fusillades sont donc légendaires, le travail formel – que ce soit sur les couleurs, les ombres et les décors – est remarquable. Le cinéaste sublime Hong-Kong et Macau ; il a également su s’entourer de stars incontournables (Simon Yam et Anthony Wong) pour livrer un polar de très bonne facture.
Certes, le scénario est aussi limité que prévisible, et la prestation modeste de Johnny Halliday ne font pas de « Vengeance » une référence du genre ni un incontournable de la filmographie du maître. Restent une mise en scène exceptionnelle, une ambiance réussie et des fusillades toujours aussi poétiques. Un bon polar.
ANTICHRIST - COMPETITION
C’est un cinéma qui n’a aucune limite. C’est une œuvre aussi troublante qu’imprévisible. C’est une réussite évidente.
« Antichrist » raconte l’histoire d’un couple venu expier la mort de son enfant dans un chalet perdu dans la forêt. Articuluer autour de plusieurs chapitres, ce film offre de grands moments de mise en scène et de recherche esthétique. Accompagnées par une musique sourde et oppressante, les images crues et violentes de Lars Von Trier fascinent comme elles peuvent révolter. Les comédiens sont tout simplement exceptionnels tant les situations sont baroques et décadentes. Willem Dafoe et Charlotte Gainsbourg sont parfaits.
Beau, violent, oppressant, fascinant, dégoûtant, malsain, misogyne (?), concupiscant, triste, surréaliste… tous ces qualificatifs montrent les extrêmes de ce long-métrage qui suscitera des polémiques quanta son cadres et ses propos.
LOOKING FOR ERIC - COMPETITION
Le cinéaste Ken Loach quitte l’espace d’un instant les affres du drame social et s’adonne à la comédie avec cette improbable séance de coaching.
Eric est un postier dépressif. Un accident déguisé en tentative de suicide le fait se remettre en question. Un jour lui apparaît son idole : Eric Cantona. Ils entament alors de longues séances de réflexion qui permettront au modeste postier de se remettre d’aplomb et de sortir sa famille de ses problèmes.
Touchant et drôle, fantasque et profondément humain, cette comédie dramatique va plus loin que son concept de base. Ce n’est ni un film sur le foot, ni un film sur l’idole de Manchester. C’est une histoire simple et poignante interprétée à merveille par un casting bien senti.
Acclamé à Cannes, « Looking for Eric » est un long-métrage drôle et attachant qui compense sa modestie par un bonheur communicatif.
37 ans après la mort de sa femme (l’actrice et mannequin Irène Tunc) , et suite à la redécouverte de journaux intimes remontant à l’époque de cette tragédie, un homme fait la synthèse de sa vie avant, pendant, et après celle-ci.
En l’espèce, il s’agit de la vie du réalisateur Alain Cavalier lui-même. Ses interrogations émeuvent car elles touchent par leur sincérité, leur justesse et leur banalité tant on est tous égaux devant la mort. Il semble revivre avec intensité ces moments, se remémore ce qui s’est passé et ce qui aurait pu être évité.
Le style artisanal et minimaliste peut dérouter, ses jeux avec les formes, ombres couleurs, etc. peuvent bousculer, mais il n’en demeure pas moins que l’œuvre accouchée de ce destin tragique est aussi sincère que poignante.
LA-HAUT - OUVERTURE - HORS COMPETITION
La magie Disney supplantée par le savoir-faire Pixar ? Plus de 50 ans après la Palme d’or de « Dumbo », le célèbre studio américain faisait, à l’occasion du 62e festival de Cannes, l’ouverture dans des conditions exceptionnelles. Public conquis d’avance, projection 3D, équipe au complet et Charles Aznavour (voix VF) en invité d’honneur. Un grand rendez-vous !
« Là-haut » raconte les aventures d’un vieillard misanthrope qui décide, suite à un procès absurde, de réaliser une promesse faite des années auparavant à sa femme désormais décédée.
On sent d’emblée que par son sujet ce film ne va pas s’adresser à un jeune public. Au contraire, « Là-haut » a le mérite d’élargir (ou la volonté de conquérir) le cinéma d’animation à un nouveau public autrefois oublié par les créateurs de ce genre de films : les seniors. Abordant avec une grande sobriété des sujets délicats comme le deuil, la solitude, le destin et par extension la vie, « Là-haut » offre de vrais moments d’émotion.
La technique irréprochable et la créativité du film viennent renforcer un peu plus la maîtrise du sujet. Accompagné par un talent indéniable pour raconter des histoires ainsi qu’une très belle musique, ce long-métrage traite avec justesse et poésie de ces moments uniques de l’existence où l’ont décide de changer.
Certes, le film ne transpire par le génie et ne révolutionne en rien ni son thème ni son domaine, mais il offre un beau voyage initiatique plein de finesse et de beauté.
FISH TANK - COMPETITION
Héritier du cinéma de Mike Leigh et Ken Loach, le film d’Andrea Arnold - aux forts accents misérabilistes et sociaux - nous plonge dans la vie de Mia, jeune fille de 15 ans qui passe son temps à boire et à faire des chorégraphies hip-hop. Son univers bascule avec l’arrivée du dernier amant de sa mère.
Traitant de la précocité et de la vie difficile de la jeunesse anglo-saxonne désabusée et abandonnée, le film est malheureusement linéaire et prévisible. Pire ! On retrouve tous les clichés du genre : famille monoparentale, pauvreté, banlieue, alcool, etc. Heureusement la fin, par un suspense à surenchère aussi intense qu’atroce, réveille un spectateur endormi par les longueurs injustifiées du film.
Reste une jeune interprète (Katie Jarvis) exceptionnelle, entourée du remarquable Michael Fassbender et de Kierston Wareing déjà vue dans « It’s a Free World » de Ken Loach.
SPRING FEVER - COMPETITION
Lou Ye, frappé d’interdiction de tournage par son pays, parvient à nous livrer ici une œuvre dense, dramatique et parfois inaccessible sur un triangle amoureux improbable dans une Chine grise et conservatrice.
Dans la ville de Nankin, une femme fait suivre son mari car elle le soupçonne d’infidélité. Le détective qu’elle engage va alors se retrouver au cœur d’une intrigue amoureuse complexe et douloureuse.
Explorant l’amour dans ce qu’il peut avoir de plus extrême et destructeur (jalousie, obsession), le cinéaste chinois dresse le portrait d’un pays conservateur et réactionnaire où l’homosexualité est taboue. La sensualité et l’érotisme de ses personnages ambigus viennent complexifier des rapports déjà chaotiques entre eux. Le casting exceptionnel du film compense la récurrence mélodramatique de ses séquences. Le grain de l’image et la quasi absence de musique fabriquent un univers lourd, pesant.
« Spring Fever » est un film remarquable sur l’amour mais il s’étend un peu trop sur son propos. La mise en scène remarquable et un casting inspiré font de ce long-métrage une réussite malheureusement trop intimiste.
AIR DOLL - UN CERTAIN REGARD
Hirokazu Kore-Eda, récemment à l’affiche avec l’exceptionnel « Still Walking », livre à nouveau une œuvre intime avec « Air Doll », l’histoire d’une poupée gonflable qui du jour au lendemain se réveille avec un cœur.
Flirtant en permanence avec le fantastique et l’onirique, ce conte moderne est un terrain propice aux interrogations sur les affres de la solitude et sur les émotions comme moteur de notre existence.
Poupée gonflable s’éveillant à la conscience, Nozomi passe par toute une phase d’apprentissage. Une fois ses besoins immédiats satisfaits (lire, écrie, etc.), elle est confrontée progressivement à des sentiments plus complexes : le vieillissement, l’amour, la mort, le chagrin, etc. Les personnages qui l’entourent et l’influencent sont autant de reflets de nos interrogations quotidiennes et le spectateur est un témoin impuissant de développement de Nozomi.
D’un point de vue purement formel, le long-métrage offre de belles compositions visuelles. Loin de la contemplation et des clichés, c’est un Japon du quotidien qui est mis en scène. Il n’empêche que Kore-Eda nous gratifie d’une œuvre douce et subtile qui encourage la réflexion. Profondément métaphysique et philosophique, « Air Doll » risque cependant de fâcher les défenseurs de Hobbes puisque cette poupée « naît » fondamentalement bonne, au sens entendu par Rousseau ou Locke.
Le casting sérieux permet au cinéaste un traitement juste de son propos. La jeune Doo Na Bae est convaincante dans ce rôle de poupée. A noter l’excellent caméo de Susumu Terajima, un habitué des films de Kitano.
« Air Doll » est un film intelligent qui, s’il prend un peu trop son temps et s’égare dans des phases répétitives, aborde un sujet complexe et foncièrement intéressant.
THIRST, CECI EST MON SANG - COMPETITION
« Thirst » est une variation de Park Chan-Wook sur le vampirisme où un prêtre catholique subit une mutation après avoir été cobaye pour des expériences sur un virus africain.
Si « Thrist » ne révolutionne en rien un genre déjà bien balisé – le prêtre passe par toutes les étapes de la découverte et la prise de conscience de son état – il subjugue par son ambiance réussie et sa mise en scène exceptionnelle.
Porté par un Song Kang-Ho remarquable, le long-métrage étonne par la simplicité de ses trucages et de ses décors. Le travail graphique cher au cinéaste est néanmoins bien présent et il nous gratifie de grands moments filmiques. La photo, les couleurs, la musique réussis n’effacent cependant pas la longueur du long-métrage qui affiche un total de 2h13.
Si le réalisateur de « Old Boy » étonne d’avoir choisi un tel sujet, son postulat de base est jubilatoire et son talent est indéniable. Sans bousculer un genre dont il aurait pu s’affranchir des codes, il subjugue par son univers, ses personnages et son ambiance.
Les geeks, nerds, hikikomori, et autres introvertis asociaux ne sont plus aussi marginaux et infréquentables qu’auparavant. Tandis que la série « The Big Bang Theory » et ses nerds cartonne aux Etats-Unis, sortira en France le 25 février le film « Cyprien » de David Charhon, tiré du personnage homonyme des « petites annonces » d’Elie Semoun.
Cyprien travaille comme responsable informatique d’un magazine de mode où les gens l’ignorent. Sa vie bascule lorsque, suite à un malentendu, il perd son emploi. Aidé par un déodorant magique (!) qui va le rendre beau (!!), Cyprien va prendre sa revanche mais se perdre un peu lui-même en chemin.
« Si tu es blonde, à forte poitrine, tu m’intéresses ». En jetant les bases d’un personnage aussi hideux que pervers, le comique français allait accoucher d’un incontournable de son répertoire. Néanmoins, il va pour le long-métrage nuancer et creuser un peu plus en profondeur son personnage. Certes, il est toujours aussi laid et malaisé, mais il laisse transparaître une sincérité et une gentillesse jamais aperçues dans ses précédentes interventions.
Le problème, c’est que l’on n’y croit pas. Cette revanche du petit moche sur la plèbe semble presque autobiographique et transpire la mauvaise foi. En pleine contradiction avec son personnage initial et les messages qu’il veut faire passer en substance, ce film qui prône la tolérance et la richesse intérieure offre son quota de femmes à poil et un niveau zéro de réflexion.
Le pire ? Ce n’est même pas drôle. Si les extraits de la bande-annonce ont eu du mal à vous arracher un sourire, fuyez. Grotesque, déjà vu, mauvais goût, superficiel, bardé de clichés… Tous les superlatifs du dictionnaire pourraient y passer. Les scènes s’enchaînent et se ressemblent. Je passerai sous silence le deus ex machina qui rend « beau » Elie Semoun (rassurez-vous, ce n’est pas possible) tant il est insignifiant et mal amené. En outre, le long-métrage est d’une prévisibilité alarmante et atteint le climax de la médiocrité lors d’une chorégraphie sur une patinoire.
Que dire alors de l’interprétation ? Mis à part le toujours excellent Laurent Stocker et l’énigme Catherine Deneuve, le niveau ne vole pas haut. Elie Semoun confirme qu’il est un piètre acteur. Quant à sa bande, leur seule réussite réside à faire ce qu’on leur a demandé : être aussi inexpressifs que laids.
Extension filmique d’un personnage plutôt limité des « petites annonces » d’Elie Semoun, « Cyprien » est une variation comico-romantique déjà vue sur la tolérance et la découverte de la richesse intérieure. Saluons tout de même un décrochage métaphorique culoté : Cyprien invite le spectateur à s’en aller s’il n’est pas content... J’aurais dû.
L’histoire met en scène Isabella Swan (Kristen Stewart) au moment où elle rejoint son père divorcé dans une petite ville de l’état de Washington. Son quotidien au lycée se trouve bousculée par l’entrée en scène de l’étrange et blafarde famille Cullen. Isabella va rapidement s’éprendre d’Edward, l’un d’entre eux. Si leurs sentiments sont réciproques, la vérité qui se cache derrière cette famille va précipiter la jeune héroïne dans une spirale aussi dangereuse que morbide.
Variation sur le thème de l’amour impossible, « Twilight » nous inflige malheureusement tous les clichés d’un genre éprouvé. Les joies, les peines, les états d’âme de ce couple improbable nous ennuient, mais peuvent peut-être séduire les amateurs de romantisme un brin guimauve. L’élément fantastique, devant apporter une approche nouvelle à ce thème, est extrêmement mal amené, et le mystère entourant la condition de la famille Cullen est traité de manière trop simpliste. D’une prévisibilité et d’une transparence pathétique, le scénario de ce film ne génère aucun suspense et ne suscite aucune passion.
Certes, d’aucuns diront que le travail sur l’atmosphère est réussi et que les décors sont beaux. Mais les effets spéciaux médiocres et le maquillage niveau amateur ne sont pas à la hauteur d’un projet de cette envergure. Pire, le pseudo beau gosse et vampire torturé à ses heures, incarné par Robert Pattinson (déjà mou dans « Harry Potter et la coupe de feu »), traîne maladroitement ses moues inexpressives et ses sourcils façon snickers, et enfonce encore un peu plus bas le niveau du film. Reste tout de même la performance convaincante de Kristen Stewart (dont la filmographie pour son jeune âge est ahurissante) qui sauve du naufrage le long-métrage de Catherine Hardwicke (qui a pourtant réalisé les excellents « Thirteen » et « Lords of Dogtown »).
« Twilight » ne se donne pas les moyens d’être sublime ni subtil. Au ras des pâquerettes du début à la fin, le film laisse songeur quant à son succès phénoménal outre-atlantique. De part son contenu et ses thèmes, il s’adresse avant tout à un jeune public déjà acquis à sa cause. Pour les autres : aucune poésie, aucune surprise, aucune envie. Rien.
Véritable génie comique, Coluche, à l’instar de Desproges, manque cruellement à notre époque et aurait certainement beaucoup de choses à dire sur le monde d’aujourd’hui. C’est plus de vingt ans après sa mort que sort au cinéma le 15 octobre 2008 un long-métrage retraçant, non pas sa vie, mais son court et intense engagement politique, à l’aube des présidentielles de 1981.
Faussement intitulé « l’histoire d’un mec », le film d’Antoine de Caunes fuit le « biopic » de l’humoriste pour s’intéresser surtout aux six mois de sa vie précédents les élections. Alors au sommet, l’humoriste décide de remuer le marasme politique ambiant et annonce qu’il sera candidat à l’élection présidentielle.
Evitant heureusement le pathos et la mélancolie, le film offre une vision alternative du clown Coluche, plus sérieuse, plus ambiguë aussi. Rythmé par son quotidien et des morceaux de ses spectacles, le long-métrage montre un homme qui délaisse sa famille et qui est dépassé par la réalité du terrain politique. En plus de prendre à contre-pied le public en montrant ce Coluche-là, Antoine de Caunes met en scène une reconstitution réussie des années 80 : musique, décors, costumes, etc. Tout est fait pour nous replonger dans la réalité d’une époque.
Malheureusement, le film ne parvient pas à décrocher de son propos, devenant long sur la fin et répétitif dans sa narration. Le long-métrage obéit à une construction assez prévisible où le même genre de scènes se répètent, confirmant ainsi la faiblesse d’Antoine de Caunes derrière la caméra. C’est d’autant plus ennuyeux que l’histoire qui nous est racontée est plus ou moins connue de tous et que ce qui se déroule est somme toute assez évident (entre les pressions du gouvernement et de l’opposition de l’époque, Coluche n’obtiendra pas les 500 signatures des maires et se retirera de la course aux élections). Pire, l’épilogue populiste et démago à souhait sur les « restos du cœur » sort de nulle part et contrarie tout le travail de patience du réalisateur sur le monde politique.
Il faut tout de même saluer la performance réussie de François-Xavier Demaison dans le rôle principal. S’il ne ressemble ni en silhouette, ni en voix, ni en visage à Coluche, on devine l’énorme travail d’acteur derrière son interprétation, lui permettant de nous offrir un personnage différent de celui qu’on a l’habitude de voir à travers des images d’archives. Pour lui donner la réplique, rien de moins que Denis Podalydès, Léa Drucker, Olivier Gourmet, ou encore Alexandre Astier.
Les événements relatés ont plus de 25 ans mais tout semble indiquer que rien n’a véritablement changé. Figure emblématique d’une époque, Coluche n’aurait pas fini de faire des commentaires sur la situation actuelle. Si ce film ne lui rend pas l’hommage qu’il mériterait, il a au moins le mérite de nous montrer au milieu d’une reconstitution réussie et d’un casting remarquable le clown sous une autre facette, plus humaine et fragile que jamais.
Loin de sauver les Etats-Unis d’une énième menace terroriste à l’instar d’un épisode de « 24 », Kiefer Sutherland interprète cette fois-ci un policier écarté de son poste après une bavure. A son alcoolisme et son chômage s’ajoutent des rapports conflictuels avec sa femme qui l’empêche de voir leurs enfants. La seule lueur d’espoir prend la forme d’un emploi de garde de nuit sur les restes d’un centre commercial qui a brûlé quelques années auparavant. Mais l’énigmatique suicide de son prédécesseur, ainsi que la quiétude morbide du lieu vont entraîner ce personnage sur les traces d’un terrifiant mystère.
Le tour de force de ce long-métrage est de proposer une histoire qui tient la route ainsi qu’une ambiance maîtrisée et réussie. Les décors, la lumière, et la photo se conjuguent merveilleusement bien et renforcent la réussite esthétique indéniable du film. Lorgnant allègrement vers l’univers visuel d’un épisode du jeu « Silent Hill », « Mirrors » alterne des décors glauques à souhaits, du gore intense et de vrais moments d’angoisse. Mais le vrai cauchemar absolu mis en scène par Alexandre Aja est de proposer des miroirs qui ne reflètent pas la réalité. En combinant tout ça, le réalisateur obtient une œuvre efficace qui remplit parfaitement son rôle pendant 1h50.
Si « Mirrors » demeure quelque peu calibré tout de même dans son déroulement, sa vraie valeur ajoutée réside dans son interprète principal, Kiefer Sutherland. Paumé, drogué, et chahuté tout au long du film, il offre une prestation remarquable et semble vraiment ravi de changer du registre d’un épisode de « 24 ». Le reste du casting lui donnant la réplique n’a certes rien de génial mais occupe suffisamment bien sa place pour ne pas plomber le film.
Au final, un long-métrage d’horreur classique mais extrêmement bien mis en scène, maîtrisé aussi bien au niveau de la réalisation que de l’ambiance, et servi par des comédiens bien choisis.
Comédie britannique encensée par la critique et récompensée par l’Ours d’argent du prix d’interprétation féminine au dernier festival de Berlin, « Be happy » met en scène les chroniques quotidiennes d’une institutrice délurée à Londres.
Loin de l’univers habituel de son réalisateur Mike Leigh, ce long-métrage confirme avant tout l’énergie et le talent de sa comédienne principale, Sally Hawkins. Néanmoins, son interprétation hystérique d’un personnage que rien ni personne arrête et qui passe son temps à rire et à gigoter finit par lasser.
Film bavard et très long pour ce qu’il a à raconter, « Be happy » déçoit par sa construction simpliste et sa vision trop manichéenne et limitée du monde. En outre, la galerie de personnages extrêmement caricaturaux ne fait que renforcer cette impression de superficialité du sujet.
Agaçant plus que distrayant, ce long-métrage léger et répétitif dans sa mise en scène a la prétention de dépeindre la vie d’une jeune femme d’aujourd’hui alors que ce qu’il a à offrir est anodin et bardé de lieux communs.
A l’instar de Dario Argento, George A. Romero est une légende du cinéma fantastique. Il nous revient trois ans après son remarquable « Land of the dead » pour son cinquième film de zombies où il plonge cette fois-ci dans l’horreur un groupe d’étudiants en cinéma, aussi victimes que témoins de ce jeu de massacre planétaire.
Non content d’avoir inventé et codifié le cinéma de zombies, George A. Romero a su aussi profiter de ses longs-métrages pour distiller ses messages engagés. Ainsi, « Le jour des morts-vivants » est une métaphore de la guerre du Vietnam, « Zombies » est une critique de la société de consommation, « Le jour des morts-vivants » est une critique du rapport de l’humanité à la science et ses dérives, et « Land of the dead » met en scène la revanche de zombies prolétaires sur de cyniques et riches humains embourgeoisés.
Le réalisateur américain profite cette fois-ci de son dernier film pour recadrer le genre reprit depuis par d’autres comme avec « 28 jours plus tard » et sa suite, « REC », ou encore « L’armée des morts », remake de « Zombies » précédemment cité. En mettant en scène un film dans le film et en faisant de ses héros des étudiants en cinéma, c’est comme si Romero s’adressait directement à son spectateur. Il ouvre le champ à la réflexion sur le genre qu’il a créé et distille de nombreux mots d’auteur, le plus fameux étant lorsque le réalisateur du film s’adresse à ses comédiens en disant « un zombie ne court pas », croche-pied direct à la tendance nouvelles des réalisateurs contemporains à dynamiser les films de zombies en faisant courir ces derniers.
Mais le film traite également et avec finesse du pouvoir des images et de la responsabilité de ceux qui veulent les tourner et/ou les montrer. Nouvelle métaphore du réalisateur qui par ce biais met en scène les propres interrogations auxquelles il a dû lui-même se soumettre au cours de sa carrière.
Il en découle que le long-métrage n’est ni vraiment gore, ni vraiment effrayant car son but ne réside finalement pas là. Amateurs de sensations fortes et d’images choquantes, attendez-vous donc à être déçus même si bien entendu le film distille son lot d’horreurs. La mise en scène est par ailleurs très réussie et confirme la maîtrise du genre par son auteur qui cette fois-ci, un peu comme Brian de Palma dans « Redacted », se sert de plusieurs supports vidéos (caméra de surveillance, caméra de téléphone, caméra à l’épaule, etc.) pour donner du relief à son œuvre et son propos.
Si les comédiens font juste ce qu’il faut (courir, hurler, tuer, tout ça), il faut évidemment rendre hommage au remarquable travail effectué sur les décors, les lumières, la photo, la musique, le maquillage qui donnent vie à cet univers d’effroi.
« Diary of the dead » n’est pas le film qui va forcément faire le plus peur, mais il va indubitablement faire réfléchir son audience déjà conquise par les œuvres du maître. Un long-métrage pas seulement réservé aux aficionados, mais qui demande un minimum de connaissances filmiques et esthétiques sur le genre mis en scène. Moins abordable que le récent film espagnol « REC », le dernier Romero explose la concurrence par la puissance de sa narration et de ses thèmes sous-jacents.