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Michael Moore est un personnage compliqué. Quand un anarcho-syndicaliste obsédé par l'argent montre dans des films SA vérité, on peut légitimement remettre en cause l'objectivité de ses propos. D'un autre côté, ce qu'il proposait avec "The big one" et "Bowling for Colombine" n'était ni plus ni moins que des documentaires, certes intéressants, mais dont le but est de montrer le point de vue d'une seule personne : son auteur. C'est donc le contraire d'un reportage qui se doit d'être neutre.

Avec "Fahrenheit 9/11", la recette est la même. Cette fois-ci, Michael Moore s'attaque aux dossiers qui gênent les États-Unis : le 11 septembre, la guerre en Irak, l'élection de Bush, etc. Le principe de fonctionnement est le même : un zapping géant entre faits, vérités et contrevérités. Le documentaire est parfois déroutant et contient de bonnes idées, mais demeure inégal et bascule souvent dans la facilité : on sait que George W. Bush est un mauvais Président mais l'insistance de Michael Moore à le présenter comme un bouffon ennuie à la longue. Par ailleurs, au milieu des nombreux thèmes - souvent passionnants - abordés, des confusions et même des bourbiers apparaissent. Pire, le réalisateur montre ses propres limites avec une "running sequence" sur une mère de famille ayant perdu son fils pendant la guerre : larmoyant, facile et démago.

En outre, ce qu'il montre est loin d'être un scoop : l'élection douteuse de George W. Bush, sa piteuse gestion nationale, les vraies raisons de la guerre en Irak, etc. Faire la guerre rapporte à court terme d'énormes bénéfices ? Une évidence ! Le budget de la défense est économiquement - et traditionnellement - celui qui tire les autres vers le haut, reconstruire un pays génère d'énormes et juteux contrats, fabriquer des armes fait tourner l'industrie. Michael Moore reprend par ailleurs son concept de la peur - comme dans "Bowling for Colombine" - comme un des facteurs explicatifs de la "conspiration" en vue de faire accepter la Guerre à l'opinion publique... trop peu traité !

Cette guerre était totalement illégitime et c'est une évidence pour tous. Ce sont les pauvres qui vont se battre et pas les fils à papa ? Quel scoop... qui est partit au Vietnam d'après vous ? (Attention : je ne cautionne pas cette injustice, soyons d'accord) Les plans fallacieux des Irakiens tout sourire sont douteux et plutôt manipulateurs. Par ailleurs, certains thèmes sont trop rapidement traités - surtout les affaires financières - et auraient mérité une plus grande attention de la part de Michael Moore qui finit par tourner en rond.

Au final le film ressemble plus à une croisade personnelle menée contre l'actuel Président des États-Unis qu'autre chose. Ce règlement de compte finit par lasser : la manipulation sous-jacente, la propagande, l'inégalité dans la manière de traiter l'information, l'absence de scoop phénoménal, etc. J'en suis même arrivé à me demander si ce film n'avait pour but que d'empêcher la réélection de Bush... dans un sens tant mieux.

Un autre débat est soulevé avec "Fahrenheit 9/11" : celui de la Palme d'or à Cannes. Il est évident que cette distinction a été attribuée pour des raisons politiques malgré les dires du jury. On ne peut décemment pas attribuer une Palme d'or à un film de cet acabit qui n'est finalement qu'un zapping d'1h50 sous forme de pamphlet. La réalisation est évidemment hideuse et la mise en scène inexistante. L'époque où "Kagemusha" recevait la Palme me semble bien loin.

Le dernier documentaire de Michael Moore est tendancieux et va forcément faire parler de lui, voire avoir des répercussions. En attendant, cette troisième production confirme tout ce que je pensais du personnage et prendre comme la vérité absolue ce qui y est dit est une immense erreur à ne pas commettre. Il n'en demeure pas moins qu'au-delà de la réalisation minable et du montage façon puzzle, "Fahrenheit 9/11" demeure occasionnellement pertinent et mérite d'être vu.

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